Qualiopi et handicap : comment rendre un processus de formation accessible ?

Cet article date déjà de 2021, mais reste d’actualité.

À partir du 1er janvier 2022, tous les prestataires participant au développement de compétences, en particulier les organismes de formation, auront l’obligation d’avoir obtenu la certification Qualiopi pour pouvoir continuer à bénéficier de fonds publics ou mutualisés (OPCO notamment).

Cette certification est une marque du Ministère du Travail et atteste de la qualité du processus mis en œuvre par notre centre de formation. Elle est délivrée à la suite d’un audit qualité réalisé par un organisme certificateur accrédité COFRAC (Comité français d’accréditation).

Access42 est fière d’avoir été certifiée Qualiopi dès juillet 2020 !

D’un point de vue accessibilité, le référentiel Qualiopi contient un indicateur qui nous tient particulièrement à cœur : l’indicateur 26, qui concerne le handicap.

Dans cet article, notre collègue Audrey Maniez, experte en accessibilité numérique, responsable pédagogique et co-gérante d’Access42, partage ses connaissances et son savoir-faire pour vous aider à prendre en compte cet indicateur et à aller au-delà, en commençant dès maintenant à rendre votre processus de formation accessible.

Répondre à l’indicateur 26

L’indicateur 26 de la certification Qualiopi stipule que « Le prestataire mobilise les expertises, outils et réseaux nécessaires pour accueillir, accompagner/former ou orienter les publics en situation de handicap ».

Ainsi, cet indicateur oblige les organismes de formation à s’intégrer dans un réseau de professionnel·les du sujet qui soient en mesure de les aider ou les accompagner pour accueillir une personne en situation de handicap.

Si cet indicateur n’oblige pas à rendre les formations accessibles, il nous semble important que les acteurs et les actrices de la formation professionnelle se saisissent de l’opportunité dès maintenant pour intégrer une démarche de mise en accessibilité de leurs formations. Comment faire ?

Formations et accessibilité numérique

L’accessibilité numérique a pour objectif de rendre tous les supports numériques utilisables par les personnes en situation de handicap et rendre ces supports numériques compatibles avec des technologies d’assistance.

Ainsi, on va rendre accessibles des sites web, des applications mobiles, mais aussi des documents PDF ou Word, ainsi que des vidéos et des fichiers audio. Autant de formats largement utilisés dans les processus de formation.

L’accessibilité numérique est un domaine très réglementé non seulement en France (article 47 de la loi du 11 février 2005) mais aussi au niveau européen (Directive européenne) et international.

De plus, la Convention internationale des droits des personnes handicapées de l’ONU reconnaît depuis 2006 les droits des personnes en situation de handicap et impose aux États membres de les respecter.

Quels organismes de formation sont concernés par l’accessibilité ?

Aucun organisme de formation ne peut raisonnablement se soustraire à l’obligation légale d’accessibilité numérique.

Certes, en France, cette obligation n’a longtemps concerné que le secteur public. Néanmoins, depuis le décret du 24 juillet 2019, les organismes de formation du secteur privé dont le chiffre d’affaires annuel dépasse 250 millions d’euros sont également concernés.

Mais outre ce seuil, il est important de préciser qu’en tant qu’employeurs, tous les organismes de formation sont soumis à une obligation de traitement égalitaire envers leurs salarié·es, notamment lors des recrutements.

Par exemple, refuser un poste de travail à une personne en situation de handicap au prétexte que le logiciel qui serait utilisé sur son poste n’est pas accessible pourrait constituer une discrimination à l’embauche.

De même, refuser d’adapter le poste de travail d’un ou d’une salariée en situation de handicap constituerait un défaut d’aménagement raisonnable.

Comment rendre accessible un document de formation ?

Pour rendre un document numérique accessible, il est essentiel de s’appuyer sur le RGAA (Référentiel général d’amélioration de l’accessibilité) qui est la norme légale en France. Il s’appuie sur les WCAG (Règles pour l’accessibilité des contenus web) du W3C.

Le RGAA est un outil précieux : il permet non seulement d’évaluer la conformité à la norme, mais aussi de créer des supports numériques accessibles. En effet, il donne la marche à suivre pour résoudre de nombreuses problématiques d’accessibilité.

Cadrage

Pour rendre un support numérique accessible, on va toucher à peu près toute la chaîne de création d’un document, à commencer par le cadrage fonctionnel du projet, c’est-à-dire, le choix des technologies, les plateformes que l’on va utiliser ou encore les interactions que l’on va définir.

Pour tout nouveau projet numérique ou refonte, il faut prendre le réflexe de se poser certaines questions, par exemple : ce support va-t-il bien fonctionner avec les technologies d’assistance ? Les utilisateurs et les utilisatrices vont-elles vraiment s’y retrouver ?

Design

L’accessibilité concerne aussi le design : par exemple, s’assurer que les contrastes de couleurs suffisent pour les textes et les composants graphiques.

Il y a aussi des obligations sur les positionnements des étiquettes de formulaires, par exemple.

De plus, on a aussi des requis sur les informations véhiculées par la couleur : par exemple si vous utilisez de la couleur pour permettre aux personnes qui suivent votre formation de catégoriser des informations, une personne aveugle n’aura pas accès à cette information. Le RGAA explique ce qu’il faut faire pour résoudre ce problème (cf. critère 3.1 et Information (donnée par la couleur)).

Développement

L’accessibilité numérique concerne aussi le développement technique des sites, applications et outils numériques.

Par exemple, il est important de s’assurer que chaque composant interactif possède un intitulé dans le code pour permettre aux technologies d’assistance de le restituer.

Il est aussi important de s’assurer que le site reste lisible et utilisable quelles que soient les préférences d’affichage de l’utilisateur ou de l’utilisatrice. En effet, certaines personnes ont besoin d’agrandir ou de diminuer la taille du texte, de changer sa couleur ou bien d’augmenter l’interlignage.

Si quelqu’un modifie tous ces paramètres, votre plateforme de formation, votre application éducative ou votre site web restent-ils bien lisibles et compréhensibles ? Si ce n’est pas le cas, des adaptations techniques pour l’accessibilité doivent être envisagés.

Supports pédagogiques et contenus éditoriaux

Bien entendu, les contenus de formation et supports pédagogiques eux-mêmes doivent être accessibles ou disposer d’une alternative accessible.

On a connu un cas d’échec dans notre équipe : notre collègue Sylvie Duchateau, qui est aveugle, a souhaité suivre une formation. Entre autres difficultés, elle a reçu un support de formation qui n’était absolument pas accessible.

Cela a été très problématique puisqu’elle ne pouvait pas accéder au contenu du support pédagogique. Ne manquez pas son retour d’expérience complet : Suivre une formation quand on est aveugle : un pari dur à gagner.

Ayez à l’esprit que dès que vous écrivez et publiez des contenus en ligne, qu’il s’agisse d’un blog, de pages web, de contenus diffusés sur les réseaux sociaux, d’un support de formation numérique (type Google Slides), de documents bureautiques, etc. : tout cela doit être accessible aussi.

Pour en savoir plus : Guide « Contribuer sur le Web de manière accessible » – RGAA 3.

Vidéos et multimédia

L’accessibilité des vidéos et des fichiers multimédia est un sujet complexe. Cela peut être très lourd à gérer si on ne l’a pas anticipé en amont !

Par exemple, une vidéo nécessite un certain nombre d’alternatives : des sous-titres pertinents et synchronisés, une transcription textuelle et une audiodescription.

Même si l’on a souvent recours à des prestataires spécialisés pour les réaliser, concevoir ces alternatives requiert un budget et un temps de production incompressibles qu’il est important d’anticiper.

Maintenir l’accessibilité sur le long terme

Ce qui est le plus difficile dans l’accessibilité numérique, ce n’est pas tant de rendre accessible, c’est de garder accessible.

Une fois que l’on a bâti la structure de manière accessible (par exemple, lancement d’une nouvelle plateforme de formation en ligne conforme au RGAA), il va être nécessaire de l’alimenter en contenus.

À ce moment-là, il est crucial de s’assurer que ce contenu demeure accessible, et que toutes les personnes qui produisent les contenus éditoriaux et pédagogiques soient formées à l’accessibilité pour éviter de produire des erreurs et de rendre des processus de formation inutilisables.

À quel moment l’accessibilité numérique intervient-elle dans un processus de formation ?

L’accessibilité numérique intervient à peu près tout le temps dans un processus de formation, en vérité !

Catalogue de formations, informations pré-inscription

Dès la phase d’avant-vente, il y a un certain nombre de questions essentielles à se poser.

Par exemple, l’information sur vos formations et votre catalogue de formations sont-ils accessibles ?

Si vous publiez vos programmes au format PDF, ces fichiers PDF sont-ils accessibles ? Autrement dit : une personne aveugle qui utilise un lecteur d’écran peut-elle les lire ? Une personne malvoyante qui perçoit mal les contrastes va-t-elle réussir à les lire ?

Si vous publiez vos programmes de formation sur un site web, ce site est-il accessible ? À défaut, est-ce que vous proposez des alternatives pour consulter l’information par un autre moyen, sous un autre format ?

C’est quelque chose de tout à fait envisageable. Par exemple, si vos programmes de formation sont disponibles au format PDF mais qu’ils ne sont pas accessibles, êtes-vous en capacité de fournir une alternative accessible aux gens qui en feraient la demande ?

Un document Word correctement structuré avec des titres est une alternative accessible conforme au RGAA.

Catalogue papier : alerte

Si vous ne disposez que d’un catalogue papier, alors c’est un gros problème, car un support papier est absolument inaccessible pour les personnes aveugles, notamment.

Créer un site web qui propose les mêmes contenus au format HTML correctement structuré est une solution à envisager.

Moyens de contact

Pour que le processus de formation soit accessible d’un bout à l’autre, il est très important de vous assurer que les moyens pour vous contacter le soient également.

Si vous avez un formulaire de contact en ligne, ce formulaire est-il accessible ?

Si c’est un fichier PDF interactif, existe-t-il une alternative à ce PDF ?

Un PDF interactif est quelque chose d’assez compliqué à rendre accessible. De même, si la seule façon de vous contacter consiste à remplir un PDF à la main et à le renvoyer, cela exclut a priori les personnes aveugles.

Enfin, si vous ne mettez qu’un numéro de téléphone à disposition de vos prospects et stagiaires, cela va poser un problème aux personnes sourdes ou muettes : elles ont besoin de pouvoir vous contacter par un autre moyen que par le téléphone.

Accessibilité de la plateforme de formation

Si vous utilisez un outil en ligne pour réaliser l’évaluation finale de vos stagiaires, si les examens de certification ont lieu sur le web, alors la plateforme utilisée doit elle aussi être accessible.

En particulier, si vous utilisez un LMS (Learning Management System), à l’heure actuelle il n’en existe pas qui soit 100 % accessibles. Et c’est un problème !

Pour trouver la plateforme qui s’intègre au mieux dans votre écosystème de formation, vous pouvez lire la nouvelle édition du guide « LMS : comment choisir sa plateforme ? » du FFFOD, qui compare plus de 20 plateformes d’apprentissage en ligne et auquel Access42 a contribué.

Classes virtuelles et visioconférences

Les formations à distance sont une problématique à part entière car elles combinent à la fois l’accessibilité de l’interface et l’accessibilité du contenu.

Si vous organisez des classes virtuelles, il y a les systèmes de visioconférences auxquels il faut prêter attention, car ils ne sont pas tous accessibles.

Zoom, Jitsi Meet, Microsoft Teams, GoToMeeting, Big Blue Button… Qui sort du lot ? Notre collègue Sylvie Duchateau les a testés : lire à ce sujet l’article Visioconférences et accessibilité : que peut-on espérer ?.

Chez Access42, nous utilisons Zoom, par exemple. Pour des personnes aveugles, a priori, c’est un logiciel satisfaisant en termes d’accessibilité. Skype, dans des formats applicatifs sur mobile, est accessible aussi.

Ce qu’il faut retenir, c’est que si vous organisez des classes virtuelles, il est possible qu’y participent des personnes qui ont besoin d’utiliser une technologie d’assistance ou certaines solutions techniques : par exemple, une personne sourde ou malentendante qui a besoin d’un sous-titrage en direct pour suivre ce qui est exprimé à l’oral.

La plateforme utilisée pour la classe virtuelle permet-elle ce sous-titrage en direct, par exemple ? Permet-elle d’incruster une interprétation en LSF (Langue des signes française) ?

Ce sont des questions légitimes à poser à vos prestataires avant d’opter pour telle ou telle plateforme.

Pour en savoir plus

Cet article vous a plu ? Alors ne manquez pas le webinaire « Et si nous parlions accessibilité ? Pour aller au-delà de l’indicateur 26 de la certification Qualiopi » dont il est extrait.

Lors de ce webinaire, Audrey Maniez est intervenue aux côtés de :

  • Michel Baujard, président de la société CFS+, cabinet conseil et organisme de formation spécialisé dans la gestion de projets et la qualité en Formation Professionnelle Continue ;
  • Thierry Liess, consultant formateur en accessibilité des bâtiments au sein de la société Liess Access.

Vous pouvez consulter la vidéo non sous-titrée sur Youtube, ainsi que sa transcription (Word, 86 Ko).

L’intervention d’Audrey commence à 38’06 et se termine à 56’39 environ.

Cet article est un condensé de l’intervention d’Audrey pendant ce webinaire.

Besoin d’aide pour rendre vos formations accessibles ?

Experte en accessibilité numérique, Access42 est aussi un organisme de formation réputé.

Cette double compétence nous a permis de concevoir plus d’une dizaine de modules de formation accessibles adaptés à tous les métiers du numérique et d’adapter certains modules à des demandes de mise en accessibilité particulières.

Par exemple, nous avons déjà eu l’occasion de faire appel à une codeuse LPC (Langue française parlée complétée) afin de rendre une formation accessible à des personnes sourdes.

Nous sommes là pour vous aider à monter en compétences en accessibilité numérique et à améliorer l’accessibilité de vos propres formations. Contactez-nous !

À propos

  • Audrey Maniez

    Co-gérante et experte accessibilité numérique

    Audrey Maniez est experte senior en accessibilité numérique, formatrice, directrice pédagogique et co-gérante d’Access42. Grâce à une maîtrise poussée des différentes normes d’accessibilité numérique, Audrey réalise des audits d’accessibilité et accompagne nos clients dans leur démarche de mise en conformité aux normes en vigueur. Formatrice chevronnée, Audrey anime nos formations les plus techniques. Par ailleurs, elle a encadré la traduction officielle en français des WCAG 2.1 publiée par le W3C, et encadre en ce moment celle des WCAG 2.2.

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